Adaptation des délais en matière administrative par les ordonnances du 25 mars 2020

Avr 3, 2020Droit des associations et des ESMS, Droit public

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Le 26 mars 2020, sont parues plusieurs ordonnances aménageant les procédures administratives et judiciaires.
Deux ordonnances concernent particulièrement l’action administrative :

  • L’ordonnance n°2020-305 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif ;
  • L’ordonnance n°2020-306 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période.

Les mesures prises visent les personnes publiques, les organismes privés gérant un service public et la Sécurité sociale.

1. Sur la prorogation des délais

Les dispositions générales prévoient que les délais et mesures qui ont expiré ou expirent entre le 12 mars 2020 et la fin du délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (ci-après identifiée comme « période spéciale »), sont reportés.
S’agissant des actes, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication imposés par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit, qui auraient dû être accomplis pendant la période d’état d’urgence sanitaire, ils sont réputés avoir été faits à temps s’ils sont effectués au plus tard dans les deux (2) mois suivants la fin de la période indiquée ci-dessus (soit la fin de l’état d’urgence sanitaire + un (1) mois.
En l’état de la loi du 23 mars 2020, la période d’état d’urgence est prévue jusqu’au 24 mai 2020.
S’agissant par exemple d’un recours tarifaire dont le délai expire au 26 mars 2020, l’ordonnance permet de croire à la recevabilité de la requête si celle-ci est introduite au plus tard le 25 août 2020.
Sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai de 2 mois à compter de la fin cette période spéciale, les mesures administratives et juridictionnelles suivantes :

  • Les mesures conservatoires d’enquête, d’instruction, de conciliation ou de médiation ;
  • Les mesures d’interdiction ou de suspension non prononcées à titre de sanction ;
  • Autorisations, permis et agréments ;
  • Mesures d’aide, d’accompagnement ou de soutien aux personnes en difficulté sociale ;
  • Mesures d’aide à la gestion du budget familial.

Il est prévu que le juge ou l’administration puisse mettre fin à ces mesures si elles ont été prononcées avant le 12 mars 2020, si elles sont saisies d’une demande en ce sens.
S’agissant spécifiquement des délais et procédures en matière administrative, l’ordonnance prévoit que les délais à l’issue desquels une décision, un accord, un avis, l’instruction du caractère complet d’un dossier ou la consultation / participation du public doit intervenir ou être acquis implicitement sont :

  • Suspendus jusqu’à la fin de la période spéciale, s’ils n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 ;
  • Commencent à courir à l’achèvement de la période spéciale, lorsque le point de départ du délai intervient entre le 12 mars 2020 et la fin de l’état d’urgence sanitaire.

Cette disposition a une incidence particulière en matière d’appels à projets pour lesquels nombres de délais sont prévus (R.313-4-1 et suivants CASF).
Les délais imposés par l’administration conformément à la loi ou le règlement, à toute personne pour réaliser des contrôles, travaux, se conformer à des prescriptions de toute nature sont :

  • Suspendus jusqu’à la fin de la période spéciale, s’ils n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020, sauf si ces prescriptions découlent d’une décision de justice ;
  • Commencent à courir à l’achèvement de la période spéciale, lorsque le point de départ du délai intervient entre le 12 mars 2020 et durant toute la période d’état d’urgence sanitaire.

Cette disposition s’applique notamment aux délais imposés par l’administration pour mettre en œuvre les injonctions suivants un rapport d’inspection au titre de l’article L.313-14 du CASF. C’est encore cette disposition qui rendrait inopposable le délai de 8 jours laissé aux ESMS pour faire des observations dans le cadre de la procédure contradictoire à la fixation du tarif (R.314-24).
L’ordonnance prévoit que des décrets peuvent fixer une reprise du cours des délais pour certaines catégories d’actes, de procédures ou d’obligations, lorsque des motifs de protection des intérêts fondamentaux de la nation, de sécurité, de protection de la santé, de la salubrité publique, la préservation de l’environnement ou la protection de la jeunesse le justifie. Lorsque pour les mêmes motifs le décret fixe une date de reprise, l’information des personnes concernées doit être assurée.
S’agissant des créances publiques, les délais applicables en matière de recouvrement et de contestation des créances publiques prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité ou déchéance d’un droit ou d’une action sont suspendus pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire augmentée de trois (3) mois. Toutes les créances dont le recouvrement incombe aux comptables publics sont concernées.
Cette disposition a vocation à s’appliquer à la contestation de décisions ordonnant le reversement ou en matière de dévolution (L.313-19 CASF).
Enfin, il est prévu une dispense de toute consultation préalable obligatoire prévue par la loi ou le règlement, sauf celles du conseil d’Etat et des autorités saisies pour avis conforme :

  • Pour les projets de texte règlementaires ayant directement pour objet de prévenir les conséquences de la propagation du COVID 19 ;
  • Pour les projets de texte règlementaires ayant directement pour objet de répondre à des situations résultant de l’état d’urgence sanitaire.

2. Sur l’adaptation des délais en matière contentieuse

En matière de délai de recours, ce sont les règles précédentes qui s’appliquent.
L’ordonnance propre à la matière contentieuse vient donner des précisions quant à la tenue des audiences.
Leur nombre est limité et la tenue d’audience en présence des parties est restreinte aux procédures urgentes[1].
L’ordonnance prévoit l’utilisation de télécommunication audiovisuelle ou de tout autre moyen de communication électronique ou téléphonique afin que le juge puisse entendre les parties. Les parties sont informées de l’absence d’audience. Le rapporteur public/ commissaire du Gouvernement peut être dispensé de présenter des conclusions sur sa requête.
Les clôtures d’instruction dont le terme vient à échéance au cours de la période d’état d’urgence sanitaire sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de cette période.
Lorsqu’un délai pour statuer s’impose au juge pour statuer, celui-ci ne commencera à courir qu’à compter du premier jour du deuxième mois suivant la date de fin de l’état d’urgence sanitaire.
[1] référés urgents, obligation de quitter le territoire français accompagnées de mesures privatives de libertés, transfert de demandeurs d’asile2.

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